Le gouvernement du Sénégal viole la loi organique relative aux lois de finances. Ce n’est pas une opinion, c’est un fait. Et un fait grave.
La loi organique n° 2011-15 du 8 juillet 2011, modifiée par la loi organique n° 2020-07 du 26 février 2020, est pourtant claire. Son article 48 énonce sans détour : « Le Gouvernement transmet trimestriellement à l’Assemblée nationale et rend public un rapport sur l’exécution du budget de l’État. »
Il ne s’agit pas d’une recommandation. Ce n’est pas un principe soumis aux aléas politiques ou aux urgences du moment. C’est une obligation stricte, continue, intangible, au cœur du fonctionnement transparent d’un État démocratique.
Aujourd’hui, où en sommes-nous ? Le rapport d’exécution budgétaire du premier trimestre 2025 n’a toujours pas été publié. Le deuxième trimestre s’achève dans trois semaines.
Le respect de la loi est la condition première de l’État de droit. Lorsque le gouvernement lui-même s’autorise à violer une loi organique sans conséquence, c’est l’ensemble du pacte démocratique qui vacille.
Le rapport trimestriel d’exécution budgétaire est un instrument essentiel. Il informe les citoyens, permet aux députés de contrôler l’action du gouvernement, garantit la transparence dans l’utilisation des deniers publics et empêche que l’argent de la nation ne soit dépensé sans contrôle. Retarder, nier ou cacher ce rapport, c’est organiser l’opacité. C’est priver le peuple de son droit fondamental à savoir comment ses ressources sont utilisées. C’est gouverner sans rendre comptes.
Un gouvernement n’a aucun droit de violer la loi. Aucun. Jamais. Il n’existe aucun argument, aucun prétexte, aucune circonstance qui puisse l’autoriser à transgresser ce qui est inscrit dans la loi. Rien. Absolument rien. Ceux qui prétendraient l’expliquer, ceux qui chercheraient à relativiser cette violation, ceux qui tenteraient d’en atténuer la portée, ne comprennent pas ce qu’est la sacralité de la loi dans la République. Ils foulent aux pieds le principe fondamental qui fait tenir l’État.
Qu’on ne vienne pas nous parler de rapports de la Cour des comptes, de tensions diplomatiques, de lourdeurs administratives, de retards techniques, de situation budgétaire complexe : rien, rien, rien ne saurait prévaloir sur l’obligation légale, simple, claire, limpide qui impose au gouvernement de publier chaque trimestre son rapport d’exécution budgétaire. Ce respect n’est pas une faveur. C’est un devoir. C’est le socle même de la légitimité de l’action publique.
Si l’État lui-même ne respecte pas la loi, alors c’est sa crédibilité même qui s’effondre. Un gouvernement qui viole délibérément la loi, sans être rappelé à l’ordre par les députés devient un danger. Un Parlement qui laisse passer ces violations sans réaction devient complice. Le silence sur ce manquement est une trahison du mandat confié par le peuple.
Combien d’autres obligations légales sont aujourd’hui ignorées ? Combien de rapports non publiés ? Combien de décrets d’application ?
Si les représentants du peuple ne défendent plus la loi, alors c’est au peuple lui-même de la défendre. Nous, citoyens, avons le droit d’exiger que l’État respecte sa propre loi, sous peine de dérive autoritaire.
Il est temps d’alerter. Il est temps de dire stop. Il est temps d’exiger que l’État respecte sa propre loi.
Je demande que l’Assemblée nationale répertorie sans délai l’ensemble des manquements actuels à la loi organique sur les finances publiques et à l’ensemble des textes réglementaires applicables. Je demande que le gouvernement publie immédiatement le rapport du premier trimestre 2025 et s’engage à respecter les délais légaux pour le rapport du deuxième trimestre. Je demande que les députés rappellent haut et fort que l’État, c’est la loi. Que gouverner ne donne pas licence de transgresser les règles qui fondent notre République.
Nous devons tous le rappeler, sans relâche. L’État, c’est la loi. Un gouvernement qui viole la loi sape les fondations mêmes de la République. Un Parlement qui laisse faire trahit le peuple souverain. Laisser cette situation se banaliser, c’est accepter la dégradation de notre démocratie.
Le respect de la loi n’est pas une option. C’est ce qui nous unit, ce qui nous protège, ce qui donne sens à notre vie collective. Le Sénégal mérite un État qui respecte la loi. Rien de moins.
Ameth DIALLO
Coordinateur national de Gox Yu Bees